Jeudi en résidence #50 avec Anne Proenza et Gabriela Trujillo
« Écrire le monde. De la réalité à la fiction. »
La rencontre s’est faite dans les murs de la Fondation Jan Michalski. Deux écrivaines en résidence, l’une vivant en Amérique latine, l’autre originaire d’Amérique latine, partagent leurs expériences d’écriture, ici, là-bas… Complices, elles dialoguent sur l’attachement paradoxal à une même aire culturelle, et plus généralement sur le rapport de la littérature au réel et à la violence.
À travers son parcours et ses expériences d’écriture, Anne Proenza explore la pluralité des formes susceptibles de raconter le monde : l’enquête journalistique, la non-fiction et la traduction pour parvenir – peut-être et pourquoi ? – à la fiction. Au fil de ses traductions, elle s’est intéressée aux romans de l’auteur nicaraguayen Sergio Ramirez à travers lesquels il raconte l’histoire récente de son pays. Dans « Les évadés de Santiago », qu’elle a écrit à quatre mains avec Teo Saavedra, elle fait le récit d’une incroyable et véridique évasion de prisonniers à la fin de la dictature de Pinochet au Chili, ou livre encore, dans « Colombie : guerres et paix », un regard personnel sur un pays empli de trésors et de tragédies. Elle s’essaie aujourd’hui pour la première fois à travailler à une fiction, mais toujours à partir du réel, saisi dans une longue enquête sur d’insoutenables crimes de l’État colombien.
Après des années d’études en Europe, Gabriela Trujillo choisit le français comme langue intime, comme langue d’écriture et comme rempart contre la violence. Dans son premier roman « L’invention de Louvette », elle adopte cette langue qu’elle dit accueillante et moelleuse pour faire naître de la guerre civile salvadorienne qu’elle a vécue enfant un personnage lui ressemblant étrangement. Comment échapper à la nostalgie des « autres rivages » ? Quelle fidélité donner aux impressions d’enfance si on les transcrit dans une autre langue ? Est-ce un leurre ?
Fondation Jan Michalski, le 5 octobre 2023